I
l était une fois, tout au fond d’une vieille maison endormie, un petit fantôme nommé Éloi.
Éloi était un tout jeune fantôme, tout blanc, tout rond… et un peu maladroit.

Chaque soir, quand les grands fantômes sortaient pour hanter les couloirs en faisant “bouuuh !”, Éloi, lui, restait caché sous sa couverture.
Car Éloi avait un secret.
Un secret un peu honteux pour un fantôme…
il avait peur du noir.

— “Mais enfin, Éloi ! Tu es un fantôme, voyons !” riait son cousin Léon.
— “Oui, mais… quand tout est noir, je ne vois plus mes mains transparentes…” répondait Éloi d’une petite voix.

Alors chaque nuit, il allumait de petites bougies trouvées dans le grenier.
Il en mettait une sur la table, une sur la cheminée, et une autre près de la fenêtre pour faire fuir les ombres.

Mais un soir, alors qu’il allait allumer la dernière, pouf !
Le vent entra par la fenêtre et souffla toutes les flammes.
Éloi se retrouva plongé dans une obscurité totale.
Son drap tremblait. Ses yeux ronds cherchaient un peu de lumière.

C’est alors qu’il entendit une toute petite voix :
— “Psst… pourquoi tu trembles comme une feuille ?”

Sur la poutre au-dessus de lui, une chauve-souris le regardait à l’envers, les ailes repliées.
Elle s’appelait Luna, et elle riait doucement.

— “Je… j’ai peur du noir,” avoua Éloi.
— “Peur du noir ? Mais le noir, c’est mon monde préféré ! C’est là que les étoiles brillent le plus fort.”

Éloi leva la tête.
Par la fenêtre entrouverte, il aperçut le ciel nocturne, profond et doux comme un manteau de velours.
Les étoiles scintillaient, et la lune dessinait des ombres argentées sur le plancher.

Luna s’envola et fit un petit tour autour de lui.
— “Ferme les yeux et écoute. Tu entends ?”

Éloi écouta.
Il entendit le vent jouer dans les arbres, les grillons qui chantaient dans le jardin, et le vieux plancher qui grinçait comme un rire endormi.
Ce n’était pas si effrayant, en fait.
C’était même… apaisant.

Quand il rouvrit les yeux, le noir lui parut moins sombre.
Il voyait maintenant les contours du grenier, la poussière qui brillait comme des lucioles.

Luna lui sourit :
— “Tu vois ? Le noir, ce n’est pas un vide. C’est juste la couleur du calme.”

Depuis ce soir-là, Éloi n’a plus jamais eu peur du noir.
Il s’envole chaque nuit avec Luna pour faire des boucles dans le ciel, saluer les étoiles et regarder dormir la ville.

Et quand il voit une lumière allumée dans une chambre, il chuchote tout bas :

“N’aie pas peur, petit humain. Le noir n’est jamais vraiment noir.
Il suffit juste d’y mettre un peu de lumière dans le cœur.”